Selon les écritures religieuses anciennes en Inde, la Vedanta, la réalité n’existe pas: Tout est illusion, apparition. En voyageant en Inde, j’ai été complètement submergé par la beauté des sites culturels et religieux et fasciné par l’environnement naturel et humain. Que des illusions ? Les impressions étaient parfois tellement intenses que je me suis en effet demandé si tout ce que je voyais était vraiment existant. Après avoir quitté le pays, ce questionnement sur la réalité s’est même redoublé, puisqu’il faut maintenant se contenter des souvenirs. Dans l’espace de mémoire se glissent mystère et magie.
Mais aussi dans la philosophie indienne, tout semble être « vrai » comme son contraire. Ainsi, la discipline hindoue Samkhya affirme que tout est réel : Shri Anirvan, un guru du dernier siècle, a raconté son soudain émerveillement devant la beauté d’une plante en fleur pendant ses méditations. Par la suite, il contestait le dogme du tout illusoire catégoriquement.
À quoi s’en tenir ? Selon Nietzsche, les illusions non plus soient expression de tromperie ou de fausse conscience, mais, au contraire, preuves de valeurs profondes à travers les actions humaines.
Confronté à de telles spéculations philosophiques occidentales et orientales, muni de centaines d’images photographiques prises lors de ce voyage en Inde (début 2004) et dans l’Asie du sud-est (en 2003), mais surtout divinement enrichi par ce que mon regard et mes impressions ont imprégné dans mon âme, j’ai essayé de me laisser guider aussi librement que possible dans mes actions et gestes artistiques donnant aussi naissance à cette nouvelle exposition.
La géométrie des compositions est choisie comme un moyen d’imposer un ordre assez strict à l’immense champ de désordre pictural. En même temps, il s’agit d’un essai de nouer avec la loi cosmique que les religions orientales situent dans la Grande Nature. Ainsi, en créant les collages avec l’aide de l’ordinateur, je me suis senti « divinement » immergé dans les concepts mathématiques et architecturaux des constructeurs de ces sites merveilleux, bâtis il y a 500, 1000 ou 2000 mille ans.
Ottawa, Avril 2004, Hans J. Mettler